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Biographie De L'auteur

  • : Le blog de Joëlle Carzon écrivain du Loiret
  • : Ce blog est destiné aux écrivains et aux lecteurs qui aiment romans et poésies. Il présentera tous les écrits et toutes les activités de Joëlle Carzon, auteur de poèmes et romans. Ce blog n'est pas destiné à recevoir des messages violents, ou politiques, ou religieux. (Suite à un messages troublant reçu ce jour : 25/12/12)
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24 septembre 2011 6 24 /09 /septembre /2011 14:09

 

Côté ciné en septembre, ce ne fut pas mémorable. J'en reparlerai dans mon bloc-notes d'octobre je pense. Après la Manche fin août, je suis allée à Gap où j'ai grimpé jusqu'à  St-Philippe  par le col de Moissières. Splendide panorama de là-haut (Hautes-Alpes, au-dessus de Gap). J'étais avec mon père et Monsieur F., monsieur réfléchi et toujours agréable. C'est bien beau quand même, les Alpes vers le Sud. Et côté Littérature (grand L), je vous reparlerai aussi certainement de l'excellentissime "Limonov" du toujours étonnant Emmanuel Carrère. Aujourd'hui et ci-dessous, une nouvelle :

 

 LE BOUQUET

 

Ces fleurs sur cette table, elle a cru qu’elles étaient pour elle. Il lui avait pourtant dit : “Nous n’irons pas au paradis ensemble”, et encore : “Le soleil ne brille pas que pour les couples”. Il lui avait montré son dos et sa nuque et ses talons, il avait refusé de répondre à ses questions, il avait ri (de ses mimiques, de sa vision des choses, de ses attitudes enfantines), il avait refusé de la laisser entrer dans la salle de bains, il ne lui avait pas donné ses dates de vacances... Et pourtant ces fleurs sur cette table, elles étaient pour elle. Les fleurs étaient pour la petite personne merveilleuse qu’elle était, ces fleurs étaient pour la femme qu’il aimait. Ces fleurs sur cette table, elle y croyait comme elle croyait à l’amour, un amour à deux, un amour partagé, un amour entre elle et lui.

Elle a cru qu’elles étaient pour elle. Elle, Françoise-Bella Cambremez. Il les lui avait envoyées ce matin. Il les avait achetées à la fraîche, plein d’elle, de son odeur, plein de son sourire rien que pour lui.

 

 

 

- Allô ?... C’est Nat ! Nat... Ta Nat. Je me suis souvenue de ton anniversaire.

- Ah ? Nat... Le bouquet de fleurs...

- Est de moi !

Françoise se mit à haïr Nat, à jamais. Rien ne pourrait jamais plus les réunir.

- Mon anniversaire est dans trois jours.

- Qu’importe ! J’y ai pensé.

- Je ne te remercie pas.

- Quoi ?

- Merci.

- Que racontes-tu ?

- Rien, dit Françoise tristement.

- Moi, j’ai rencontré le grand amour.

- C’est bien.

- Ne veux-tu pas que je te raconte ?

- Comment s’appelle-t-il ?

- Marc.

- Marc Durrieux ?

- Oui, tu as deviné !

- Et il t’aime ?

- Autant que je l’aime.

- Comme il aime et est aimé de Paula, d’Anne...

- Quoi ?

- ... Et de Marie Escal, dit Françoise qui inventait au fur et à mesure.

- Tu rigoles ! Qui est Marie Escal ?

- Oh ! une secrétaire quelconque... De grandes jambes, une grande bouche. Tout de grand. Ils vont assez bien ensemble, Marc et elle, je veux dire physiquement, esthétiquement.

- Paula et Anne : non...

- Paula, c’était aux vacances dernières, entre deux palmiers. Anne, c’était il y a quinze jours. Il va vite, ton Marc.

- Je n’y crois pas.

- Il n’a guère le temps d’acheter des fleurs, lui. Il est en pleine action.

- Pourquoi me dis-tu tout cela si... brutalement ?

- Je suis pour la vérité, la vérité pure. Tu dois avancer dans la lumière, tu ne peux mourir idiote.

- Je ne reconnais pas ta voix.

- Et moi je ne te reconnais pas quand tu déclares : “j’ai rencontré le grand amour”.De ta part, nous avons l’habitude à moins d’emphase. “Le grand amour” et toi, ça ne fait pas bon ménage.

- Que se passe-t-il, Françoise... Allô ?... Tu m’as menti, n’est-ce pas ?

- Je ne mens jamais.

- Je te téléphonais pour...

- Pour m’annoncer un bouquet de fleurs. Il est là, il est bien là. Je suis en train de le regarder, tu vois... Il est beau. J’ai à faire. Je te rappellerai, pour te consoler, si j’ai le temps.

 

 

 

Françoise raccrocha. Il pleuvait dehors. Elle allait jeter... Non, piétiner avant, cet infâme bouquet. Il puait l’amour inexistant, l’amitié imaginaire, les mots si vite prononcés. Il puait. Il pleuvrait toute la journée. L’autre, Nat, pleurerait son amour perdu. Chacune de ses larmes serait un baume pour Françoise. Son anniversaire serait dans trois jours. Nat ne serait pas invitée. Elle n’appellerait plus jamais Françoise. Le bouquet pleurait au milieu de la pièce.

 

Gien, 2004

 

 

 

 

 

 

 

 

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